Sensible aux difficultĂ©s que certains managers vivent quand leur entreprise emprunte le chemin de lâagilitĂ©, dans cet article jâai voulu explorer l'Ă©tymologie du mot Manager, un peu dâhistoire du management et les consĂ©quences des dĂ©cisions non adaptĂ©es au contexte dans lesquelles elles sont prises.
Enfin, vous aurez quelques références pour explorer les concepts qui vous aideront à faire évoluer votre maniÚre de penser, agir et prendre des décisions.
Mais que signifie le mot Manager ?
Selon le Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales (CNRTL) l'Ă©tymologie du mot Manager est la suivante (extrait) :
- Manager (subst., masc.), Ă partir du XVIII siĂšcle terme dĂ©signant le responsable dâune entreprise ou dâune institution.
- Manager (verb trans.), 1969 diriger, organiser.
Le manager est un dĂ©cideur, un coordinateur, sa responsabilitĂ© est de maĂźtriser les risques opĂ©rationnels de lâentreprise et le budget de son dĂ©partement.
BrĂšve histoire du management
Au début de la révolution industrielle, les défis des entreprises étaient de réussir une production de masse (à la chaßne) le plus efficacement possible.
La concurrence nâĂ©tait pas sur les produits et leur Ă©volution mais sur la capacitĂ© Ă produire des grandes quantitĂ©s le plus rapidement possible pour satisfaire les besoins primaires de la sociĂ©tĂ© (de la voiture au grille-pain en passant par lâaspirateur).
Dans son livre âPrincipes de Management Scientifiqueâ, W. Taylor thĂ©orise les piliers dâun management efficace pour son Ă©poque. Il a eu un Ă©norme succĂšs et ceci a donnĂ© naissance aux thĂ©ories dâorganisation dâHenri Fayol qui structurent encore aujourdâhui beaucoup dâentreprises.
Le rÎle du manager a été central dans ces succÚs.
Dans ce contexte, toute lâattention du manager est centrĂ©e Ă l'intĂ©rieur de lâentreprise, il ou elle sâassure que les risques opĂ©rationnels sont maĂźtrisĂ©s et les budgets respectĂ©s. Il nâest pas nĂ©cessaire dâĂ©couter les utilisateurs, car ils nâont pas dâautre choix que dâacheter ce quâon leur propose, la concurrence est quasi nulle.
LâĂ©volution du contexte et lâadaptation du manager (ou pas)
Depuis 1900, le contexte a Ă©voluĂ©. La concurrence a fait que le consommateur (utilisateur) a maintenant le choix, il y a Ă©normĂ©ment de produits disponibles sur le marchĂ© pour rĂ©soudre un problĂšme donnĂ©. Ce qui fait la diffĂ©rence est parfois une fonctionnalitĂ© particuliĂšre dâun produit Ă un autre.
LâĂ©volution du contexte a amenĂ© deux phĂ©nomĂšnes distincts (je vais volontairement dans les extrĂȘmes, conscient quâil y a aussi des nuances) :
- Lâabsolue croyance (Ă outrance) dans les principes de la rĂ©volution industrielle, ce qui a lentement amenĂ© Ă la dĂ©shumanisation du travail : le paradigme dans lequel lâentreprise Ă©volue nâest pas remis en question, les personnes oui.
- On continue avec la mentalitĂ© de la production de masse, pour les dirigeants le problĂšme ce sont les personnes qui ne travaillent pas assez (bien). Lâentreprise se replie encore plus sur elle-mĂȘme, on observe lâaugmentation de la bureaucratie, du contrĂŽle du personnel, souvent devenue responsabilitĂ© (injustifiĂ©e) du manager.
- Le manager devient un contrĂŽleur du personnel (comme on le faisait autrefois pour les machines). On doit Ă tout prix sâassurer que les personnes sont occupĂ©es tout le temps pour quâelles soient rentables đ©
- La méfiance, interne et externe, est florissante. Tout est pensé et fait pour se protéger (internement entre collÚgues et extérieurement avec les fournisseurs et clients). On complexifie la contractualisation et les aspects juridiques.
- Les clients sont piégés avec des contrats qui les obligent à payer pour des produits de mauvaise qualité et/ou qui ne rendent pas le service attendu.
- Les talents sâen vont, car ils Ă©touffent (et pour plein dâautres raisons) ou, sâils restent, ils sont dĂ©sengagĂ©s et dĂ©motivĂ©s.
- Pire encore, les nouveaux mĂ©tiers (qui nĂ©cessitent lâexploration de solutions et la crĂ©ation de produits ou services intangibles) comme lâinformatique, sont organisĂ©s comme lâĂ©taient les chaĂźnes de montage de voitures (recueil des besoins, spĂ©cification, dĂ©veloppement, test, etcâŠ). Les problĂšmes consĂ©quence de ce type de dĂ©cision, dans ces entreprises, sont encore une fois les personnes et non pas le choix de sâorganiser comme en 1900 pour rĂ©soudre des problĂšmes de 2021 !
- La remise en question des paradigmes Ă©tablis, la comprĂ©hension du fait quâil est nĂ©cessaire d'adapter sa maniĂšre de penser, agir et prendre des dĂ©cisions dans le contexte actuel et que le problĂšme ne concerne pas les personnes. Le manager qui comprend cela, contrĂŽlera toujours les risques opĂ©rationnels de lâentreprise, mais dâune maniĂšre diffĂ©rente, adaptĂ©e Ă notre Ă©poque.
- La production de masse nâest plus quâune consĂ©quence du fait quâon a rĂ©solu un problĂšme commun Ă plusieurs personnes (nous avons crĂ©Ă© de la valeur). Elle nâest pas planifiĂ©e dâavance. Lâentreprise sâouvre au monde, lâĂ©coute et apprend des feedbacks.
- Le manager devient un Servant Leader, une personne exemplaire du point de vue du comportement et des principes, garante dâun cadre de travail souple (Scrum) et Ă disposition des personnes qui ont besoin dâaide pour rĂ©soudre des problĂšmes. Il ou elle rĂ©-humanise le travail !
- La confiance, interne et externe, est florissante. Les relations sont basées sur des valeurs universelles (comme les Valeurs Scrum de Courage, Focus, Respect, Engagement et Ouverture).
- Les utilisateurs/clients collaborent Ă la recherche de la meilleure solution pour le problĂšme donnĂ©, ils savent que lâentreprise a les connaissances fonctionnelles et techniques et peut les aider Ă trouver une solution qui leur permettra dâavancer. Ils sont contents de payer le service car ils en retirent un bĂ©nĂ©fice de son usage.
- Les talents se dĂ©veloppent, ils sont heureux de postuler pour contribuer Ă la mission de lâentreprise; ils se sentent Ă©coutĂ©s, ils peuvent ĂȘtre force de proposition, ils sont actifs et engagĂ©s. Ils existent !
- Il a Ă©tĂ© compris que dans un contexte complexe, lâorganisation du travail doit Ă©merger et ĂȘtre dĂ©cidĂ©e par les personnes qui font le travail. L'auto-gestion autour dâobjectifs clairs fonctionne car chacun a compris ses responsabilitĂ©s.
La remise en question des paradigmes établis avec la révolution industrielle a commencé en 1986, au Japon, vous pouvez lire cette publication pour en savoir plus.
La suite a Ă©tĂ© l'expĂ©rimentation dans le monde de lâinformatique, avec Scrum, le cadre de travail qui aide les personnes et les Ă©quipes Ă rĂ©soudre des problĂšmes complexes.
PrĂ©sentĂ© publiquement en 1995 et adoptĂ© aujourdâhui par beaucoup dâorganisation qui crĂ©ent tout types de produits, Scrum est l'Ă©chafaudage qui vous permettra de ravaler votre connaissance de manager et revenir au travail avec une maniĂšre de penser, agir et prendre des dĂ©cisions adaptĂ©e au contexte complexe dans lequel nous vivons.
Comment faire pour en savoir plus et adapter son style de management Ă cette Ă©poque ?
Comprendre mieux ces sujets, en lisant les références présentes dans cet article est un premier pas important.
Pratiquer des petits changements de maniĂšre itĂ©rative et incrĂ©mentale, avec des personnes de confiance au dĂ©but, vous aidera Ă prendre de lâassurance et Ă©voluer petit Ă petit vers plus de servant leadership.
Comprendre Scrum et les responsabilités du Scrum Master pourra vous aider à contextualiser le rÎle de Servant Leader dans un cadre de travail agile.
Références :
- Management Three Eras: A Brief History de Rita Gunther McGrath
- Petites victoires : et si la transformation du monde commençait par⊠vous ?, Philippe Silberzahn
- A Leaderâs Framework for Decision Making, David J. Snowden et Mary E. Boone
- The Servant as a Leader, Robert Greenleaf
Le Guide Scrum